(Bon, je m'essaye. Attention, je suis vraiment rouillée. XD J'ai calculé et ça fait au moins 5 ans que j'ai pas fait de RP... Mais je vais me réhabituer!)


Valérie pédalait énergiquement. Un peu plus loin, tout un bataillon de gamins sortait en trombe du petit établissement qu'elle eut vite identifié comme étant une école. Val eut un sourire en coin lorsque certains d'entre eux passèrent à côté d'elle en courant, risquant à tout moment de trébucher et de se casser les dents sur le béton du trottoir et elle ralentit un peu, histoire de minimiser les dégâts si elle en accrochait un.

Perdue dans ses pensées, elle songeait sombrement à son rêve de la veille. Elle avait trouvé sa réaction trop faible. Si elle trouvait vraiment celui qui l'avait mit à l'Orphelinat, elle n'irait pas de main morte... Peut-être se serait-elle expliquée avec lui pendant quelques minutes mais sa patience aurait été de courte durée et si l'individu n'avait pas eu une bonne explication, elle en serait probablement venue aux coups, pour la première fois de sa vie. Ce n'était pas la première fois qu'elle faisait ce genre de rêve, mais les fois d'avant, elle n'était pas restée aussi calme et avait finit par se réveiller bruquement, écumante de rage envers ce sale type qui avait choisi cet Orphelinat là et pas un autre... Mais c'était pour une raison bien précise, elle en était sûre. Ce gars-là avait un lien étroit avec l'Orphelinat... Mais lorsqu'elle était encore là bas, elle ne s'en souciait pas. Peut-être même qu'elle l'avait cotoyé tous les jours, sans le savoir, sans s'en rendre compte...

Sans s'arrêter, elle regarda des deux côtés de la rue avant de traverser. En descendant du trottoir, la chaîne sauta du dérailleur avec un bruit sourd dès que la roue eut touché l'asphalte de la route, mais elle pédala dans le vide un tour ou deux, perplexe, avant de s'en rendre vraiment compte. Lasse, elle descendit de son vieux vélo tout en se dirigeant vers le trottoir d'en face. C'était au moins la dixième fois qu'il lui faisait le coup aujourd'hui, comme tous les jours, d'ailleurs. Ce misérable deux roues n'avait rien d'un BMX ou d'un VTT et n'était vraiment pas sa fierté, mais elle le gardait tout de même, faute de moyens et aussi un petit peu par attachement malgré son guidon désaxé par rapport à la roue avant, le pneu arrière qui se dégonflait tout le temps, le morceau manquant au pédalier, l'absence de frein sur la roue arrière, le dérailleur qui déraillait à la moindre secousse et la pédale manquante qui la contraignait à poser son pied sur la mince barre de métal qui supportait autrefois la palette de plastique. Alors, elle le hissa sur le trottoir, se battit un moment avec la béquille bloquée, en vain, pour finir par l'appuyer contre la clôture la plus proche, sans faire réellement attention au jeune homme non loin et aux nombreux enfants qui passaient à côté d'elle, la frôlant parfois.

Elle remit la chaîne d'une main experte et fit quelques tours de pédale en sens inverse avant de se relever. Elle regarda ses mains un bref moment... Avant de finalement tirer un mouchoir de son sac pour les essuyer avec dédain. Puis elle jeta un coup d'oeil aux alentours et essaya tant bien que mal de redresser le guidon vis à vis la roue avant pour un peu plus de confort.

M’enfin bref. Fini la nostalgie. Nous – les gens – on vie dans le maintenant. A la dernière seconde. Et en parlant du présent, le pédophile qu’il venait de croiser n’avait pas de rêves très agréables. Hmm… pour lui, oui, peut-être, mais Duke ne sentait pas la nécessité d’en savoir plus et bloqua les rêves de l’homme à l’instant. L’autre – la mère – n’avait rien d’intéressant à raconter non plus. Cette femme était rempli d’angoisses. Un évènement tragique de son passé était sûrement la cause de ses cauchemars. Mais ça n’avait guère d’importance. Marmaduke avait espéré trouver un peu de réconfort dans les pensées nocturnes des parents de gosses mal-nourris ou justement pleins d’énergie, mais non. La quantité de rêves irréalistes s’était élevé à un pourcentage si nombreux que Duke lui-même avait du mal à filtrer les rêves d’enfants des rêves d’adultes. Les nuages roses, les prairies pleins de fleurs ou les cauchemars de noyades et de monstres n’étaient pas sur sa liste aujourd’hui. Il cherchait quelque chose de plus particulier. Une angoisse profonde. Quelque chose de psychologique. Pas un rêve superficiel. Quelque chose de pensif.

C’est en perdant les derniers bouts de patience qu’un rêve surgit parmi les autres. Pas exactement ce qu’il avait cherché, mais assez intéressant pour y prêter plus d’attention. La surprise du jeune homme était grande quand il aperçu que ce n’étais pas un adulte, mais une jeune demoiselle qu’avait eu un rêve remplis de vengeance. Et elle n’était qu’à quelques pas de distances !

La chance le souriait !

Duke ne perdait pas un moment, de peur que la gamine parte avec son vélo – qui avait d’ailleurs l’air de pas être très stabile – une fois qu’elle avait récupéré la chaine. Sans se soucié de quoi que ce soit, il se plaça derrière elle, en penchant légèrement pour mieux observer ce qu’elle fabriquait.

« Alors, jeune demoiselle, besoin d’un coup de main ? »

Valérie se démenait avec son vélo en le coinçant solidement contre la clôture, et ses efforts pour remettre le guidon en place ressemblaient surtout à une prise de catch. C'était ma foi plutôt efficace, peut-être même trop car il se vrilla dans l'autre sens, ce qui le ramenait à sa position initiale... Mais de l'autre côté. Elle poussa un soupir exaspéré et s'apprêtait à repartir lorsqu'une voix retentit derrière elle:

« Alors, jeune demoiselle, besoin d'un coup de main? »

Val se retourna vivement et se trouva face à face avec un grand jeune homme, qu'elle ne connaissait pas. Elle l'observa en détails, l'espace de quelques secondes. Derrière eux, les enfants se faisaient moins nombreux, la plupart d'entre eux déjà loin et quelques parents attendaient toujours, passablement inquiets. Mais ces détails avaient disparu de son esprit et toute son attention était maintenant concentrée sur son interlocuteur, qui l'intriguait beaucoup. De nos jours, la galanterie se faisait rare et il était toujours plaisant de se faire aider, mais ce genre d'attitude suscitait en elle, aux premiers abords, une certaine méfiance. Mais après tout, il n'avait pas du tout l'air d'un meurtrier assoiffé de sang, il semblait au contraire très sympathique, et l'expression de son regard mettait un peu en confiance. Alors, de son éternel optimisme, elle lui adressa un sourire rayonnant.

« Vous me feriez très plaisir! »

Toujours souriante, elle se déplaca pour lui laisser l'accès libre à la roue avant tout en déposant son sac sur le sol, dans l'herbe, près de la clôture. Soudain, il lui rappela vaguement quelqu'un, une personne de l'Orphelinat qu'elle avait peut-être entr'aperçu quelques années plus tôt. Mais... Si ce n'était pas lui? Son visage était jeune. Était-ce un pensionnaire ou bien un Bêta? Le visage qui refaisait surface dans son esprit était incertain... Si elle avait véritablement déjà vu cette personne quelque part, elle n'était pas capable de classer ce visage dans une quelconque tranche d'âge. Et si c'était un Delta? Son sourire se perdit. De toute façon, les Omégas n'ont rien à craindre des Deltas tant qu'ils n'ont pas vingt-cinq ans... Elle se calma un peu à cette idée, mais que ferait-il ici si c'était un Delta? Et si en fait ce n'était qu'un jeune homme galant qui n'avait aucun lien avec l'Orphelinat? De toute façon, elle ne traînerait pas ici et il n'y avait que peu de chances qu'elle l'ait vraiment déjà vu quelque part... Ce souvenir remontait à ses premières années à l'Orphelinat... Périmé depuis longtemps, en somme.

Elle pencha un peu la tête lorsqu'il la fixa, avec un regard interrogateur et un léger sourire qu'elle avait rapidement raccroché sur ses lèvres. Elle évalua son regard avec intêret mais n'en déduit rien de particulier.

Mais au moment même ou elle se disait qu'elle ne l'avait en fait jamais vu, il lui dit:
-Donc je suis supposé faire quoi... Petite Oméga?
Son sourire retomba et elle se raidit. Petite Oméga? Donc il l'avait probablement déjà vue. Mais il l'aurait vu alors qu'elle était très jeune... Son apparence ne marquait pourtant pas les esprits et elle avait beaucoup changé depuis. Comment il savait ça? Peut-être était-ce son pouvoir qui lui permettait de savoir? Peut-être qu'il lisait dans les pensées et qu'il avait capté les siennes quand elle pensait à l'Orphelinat, de l'autre côté de la rue? Encore une fois, elle se sentit impuissante, elle, qui avait un pouvoir des plus inutiles, qui avait quand même passé 9 ans de sa vie dans l'Orphelinat et qui allait quand même aller à la guerre. Raison de plus pour essayer de retrouver le gars qui lui avait fait ça...
- Redresser le guidon.
Elle s'accroupit près de lui.
- Idéalement, tu pourrais serrer la roue entre tes genoux et si on regarde d'en haut, il faudrait que le guidon soit perpendiculaire à la roue. Mais il est dur et je suis pas assez précise pour le remettre en place, je le tourne toujours trop... lui dit-elle en illustrant ses paroles avec des gestes.
Elle se releva, toujours aussi raide et mal à l'aise. Mais finalement, il ne pouvait être qu'un Oméga... Un Delta ne serait pas forcément venu l'aider et un Bêta n'avait rien a faire aussi loin de l'Orphelinat. D'ailleurs, elle savait elle aussi qu'elle n'avait pas l'intelligence nécéssaire pour devenir Omicron, qu'elle ne l'aurait jamais et qu'elle aurait beau se réfugier à l'autre bout du monde, les Deltas viendraient tout de même la chercher. Non, son but premier était de survivre dehors - mais pour ça elle se débrouillait plutôt bien - et en deuxième lieu, trouver celui qui l'avait mise à l'Orphelinat pour lui faire la peau. C'était tout ce qu'elle pouvait faire et cet homme-là, c'était bien la seule personne qu'elle pensait irrécupérable en matière de bonté et également la seule personne à qui elle en voulait. Elle n'était rancunière envers personne, en temps normal... La rancune, une chose qu'elle détestait ressentir en elle et chez les autres.
Elle se détendit à l'aide d'une grande inspiration et retrouva son sourire.

Lui, il n'avait pas l'air rancunier. Non. Il avait l'air d'être quelqu'un de bien.

- C'est quoi ton nom? demanda-t-elle avec sympathie.

En effet, elle souriait toujours. Tout le temps. Son sourire faisait office de masque, parfois, mais il était sincère la plupart du temps. Parce-qu'elle avait bien compris depuis bien longtemps que faire la gueule ne servait à rien. S'apitoyer sur son sort de la mènerait nul part. Rien ne pourrait jamais la tirer de cette situation et quitte à pleurer ce qui allait lui arriver, autant l'oublier et profiter du temps qui lui reste... Avec le sourire! Elle avait l'habitude des gens qui la prenaient pour une abrutie parce-qu'elle était toujours souriante. Mais elle, elle savait que c'était une force d'esprit et que ceux qui abusaient de sa gentillesse, tant pis pour eux... Ça leur reviendrait un jour dans la tronche, d'une manière ou d'une autre. Et si ce Duke décidait de profiter de sa sympathie, elle foutrait le camp et attendrait que le karma lui revienne dans la gueule. Au final, elle n'avait rien à perdre... Ces gens-là, par contre, oui.
Valérie était une personne très contradictoire dans le sens qu'elle pouvait faire face avec le sourire aux gros problèmes auxquelles elle ne pouvait pas remédier, et fuir les plus petits, qu'elle peut trouver insurmontables. Bien sûr ce n'était pas le seul point sur lequel elle était contradictoire, non... Mais ça, on aurait pu en faire une très longue liste sans tous les mentionner.

« On m’appelle Duke, » répondit-il en bloquant la roue du vélo entre ses genoux. « Donc tu peux m’appeler comme ça aussi. »

Elle ne répondit pas et le regarda redresser le guidon, silencieuse. Une fois le guidon redressé, elle prit son vélo et le regarda de près avant de relever les yeux vers lui.

« Merci, Duke.»

« Tu t’en vas quelque part à cette vitesse ? »

Le sourire de Valérie, pour le moment, penchait plutôt du côté du masque. Duke l'effrayait un peu. *Qu'est-ce qu'il peut bien me vouloir?* Mais comme d'habitude, Val fuyait les problèmes. C'était pour cette raison qu'elle avait ignoré la façon dont il l'avait appellée et c'était aussi pour ça qu'elle avait l'intention de dégager le plus vite possible. Mais voilà, la question piège... Parce-que Valérie n'était vraiment pas une bonne menteuse. Si elle était capable de cacher ses émotions, c'était tout le contraire lorsqu'il s'agissait de parler. Alors, elle paniqua un instant et décida de répondre franchement:

« Sincèrement, non. Je me promenais.»

Puis, ne souriant plus du tout, elle se pencha par dessus son vélo et le regarda de plus près, de ses grands yeux verts et vifs dans lesquels se reflétait une lueur de défi... Sans aucune méchanceté, pourtant. Juste une sorte de curiosité bien précise, une question tranchante pour régler tout un tas de choses dans son esprit.

« Qu'est-ce que tu veux, exactement? »

« Bon, euh… j’crois pas que c’est très organisé chez moi, mais si tu insistes à voir ma BD en progrès – et je ne dis pas que tu insistes, m’enfin bon – je pourrais aller la chercher et puis… euh… on n’a qu’à trouver un endroit où parler, nan ? Tu connais un peu les districts ? »

Val retrouva alors son sourire resplendissant. Non, elle ne connaissait rien aux districts et oui, elle insistait à voir sa B.D - elle avait d'ailleurs toujours adoré ce qui était relié à la lecture. Mais alors, où pouvaient-ils aller? Dans un autre resto, confortable avec des bonnes banquettes pour discuter? Ils pourraient parler là en attendant d'avoir faim, mais elle doutait que son porte-monnaie soit en état de payer dans un restaurant de ce style, et elle ne voulait pas non plus passer des heures dans l'atmosphère grasse et insalubre d'un de ces vieux fast-food de quartier. Elle détestait se sentir huileuse comme une sardine en ressortant de McDo, et son foie n'aimait pas beaucoup l'odeur de friture persistante qui lui restait collée aux narines.
Chez elle, alors? Son minuscule appartement, qui aurait été catalogué dans la catégorie "Studios" si il n'y avait pas eu un petit salon à part, pouvait être adapté aux longues discussions si elle ressortait ses vieux coussins du placard pour adoucir un peu la dureté du sofa qui, une fois déplié, lui servait de lit. Oui, aller chez elle était sûrement une bonne alternative. Il lui restait d'ailleurs des pâtes à faire cuire, un peu de lait, quelques fruits et de la soupe en sachet qu'elle pouvait faire si ça lui tentait.

« Ben, si tu veux on peut passer chez toi chercher ta B.D et aller chez moi ensuite pour que tu me la montres, j'ai très envie de la voir.»